Alex Lutz au cinéma des Carmes : balle de match

Quel plaisir de retourner dans les salles obscures pour se plonger dans un long-métrage, confortablement installé sur son siège, dans une ambiance à la fois chaleureuse et intime. Un plaisir décuplé par la présence d’un réalisateur et de comédiens…

Ce vendredi pas comme les autres, le cinéma Les Carmes fait salle comble pour l’avant-première du film « 5^èmeset »… soit une jauge de 35%. Mais qu’importe, les sourires sont sur toutes les lèvres, les yeux pétillent de joie. Il faut dire que cette séance est particulière. Le comédien Alex Lutz, local de l’étape puisqu’il vit non loin d’Orléans, s’est installé, avant la projection, au soleil en face du cinéma pour une séance de dédicace improvisée de son premier roman, « Le radiateur d’appoint ». Il discute en toute simplicité avec les badauds qui ont la chance de passer par là, en attendant sa partenaire du film, la belle Ana Girardot, et le réalisateur Quentin Reynaud. La vie reprend. L’art retrouve toute sa place dans la vie des gens, enfin…

Une fois entré dans la salle, il y a comme une atmosphère de fébrilité. C’est presque irréel… « C’est un moment très fort de vous revoir dans les salles de cinéma, souffle Alex Lutz. Cette année passée, on a passé notre temps à y croire, à ne plus y croire. A force d’y croire tous ensemble, on peut enfin se retrouver. » Alex Lutz avait promis à Michel Ferry de venir présenter le film aux Carmes, promesse tenue, rêve réalisé pour les cinéphiles orléanais. « Bon film ! » Noir complet dans la salle, puis début du générique. Etre au cinéma, c’est comme être de retour chez soi, on retrouve les sensations familières, l’envie de partager ses émotions avec ses proches, l’empathie ressentie pour les personnages. Et « 5^ème set » est un peu le film idéal pour retourner au cinéma. Prenant le prétexte du sport mais au final universel, il parle des échecs, du dépassement de soi, des liens familiaux, du poids du passé, des rêves d’avenir… Premier long-métrage en solo de son jeune réalisateur, « 5^ème set » raconte l’histoire de Thomas, presque 38 ans, ancien espoir du tennis français qui n’a finalement jamais brillé. Il se prépare à ce qui devrait être son dernier tournoi mais refuse d’abdiquer. Subitement enivré par un désir de sauver son honneur, il se lance dans un combat homérique improbable au résultat incertain… C’est ici le drame shakespearien d’une vie trop ordinaire qui se joue.

Entièrement porté par Alex Lutz qui une fois de plus ne joue pas mais incarne, transpire par tous les pores un personnage criant de vérité prêt à tout sacrifier pour vivre le destin qui lui fût promis un jour, le film frappe fort. Surtout dans les parties consacrées au tennis et à la vie d’un sportif de haut niveau, avec la souffrance, les sacrifices qu’elle induit. Et comment ne pas parler des matches de tennis à Roland Garros totalement prenants et surtout de ce dernier match/combat d’anthologie. Stupeurs et tremblements. Alex Lutz, tendu comme un arc, à vif, puissant, nous prend aux tripes, les larmes affleurent. Il a rêvé sa vie et finit par vivre son rêve… mais à quel prix ?

Un peu sonnés, émus, comblés il faut le dire, les spectateurs peuvent ensuite dialoguer avec Alex Lutz, Ana Girardot et Quentin Reynaud.« Alors non, je ne suis pas devenu un tennisman de haut-niveau, sourit Alex. Je ne jouais pas bien avant le film, et je ne joue toujours pas très bien après le film. J’ai eu un protocole sportif de 4 mois ½ avec un coach, de gainage, musculation… le matin et puis d’aspect tennistique pour le film l’après-midi. C’était un travail très chorégraphié, détaillé, on a beaucoup joué sur le calque avec ma doublure ». « C’est là où je l’attendais, il est à l’arrêt avec sa raquette à la main, et on voit un tennisman qui joue depuis plus de trente ans, détaille Quentin. Alex a une grosse capacité d’incarnation et d’investissement qui fait qu’il était là au moment où il fallait. » Une spectatrice félicite ensuite Ana Girardot, royale dans le film, qui met en valeur son mari dans l’histoire :« J’ai trouvé le scénario magnifique et l’idée de travailler avec Alex m’enchantait. Je ne voulais pas être femme de, une femme qui attend ou qui est un frein pour son mari. J’ai donc beaucoup réfléchi à la place de cette femme qui a tant sacrifié, sa carrière, ses rêves, pour créer un foyer. Elle n’a pas eu le choix contrairement à lui, et en même temps c’est le pilier du couple. Derrière chaque homme, il y a une femme ». Un autre spectateur souligne combien il est rare au cinéma de parler d’un sportif qui se trouve dans les profondeurs du classement, d’un « smicard du tennis », de l’envers du décor.« C’est ce qui m’intéressait, montrer combien c’est un sport dur, individuel, violent aussi », souligne le réalisateur qui connait bien le milieu du tennis.Il y a là une réflexion autour de la gloire, de l’égoïsme, de la persévérance et de l’oubli de l’autre. « On a fait visionner le film à des personnes qui n’aimaient pas le tennis et elles ont aimé le film ! » « Ce que j’aime par-dessus-tout dans le film, poursuit Alex Lutz, c’est que ce n’est pas un biopic. J’adore qu’on fasse le pari de vous faire connaître ce type. Souvenez-vous de la balle de match en 2002. Quand on y croit, le pari est gagné. » La magie du cinéma !

Le cinéma Les Carmes fait carton plein ce week-end avec plusieurs avant-premières en présence des équipes de films :

• Jeudi 3 juin à 18 heures : Fernand Trueba (Oscar du meilleur film étranger pour Belle Époque en 1994) présente « L’Oubli que nous serons » (El olvido que seremos)
• Samedi 5 juin à 15 heures : Benoît Jacquot (Les Adieux à la reine) présente, samedi, « Suzanna Andler », d’après la pièce éponyme de Marguerite Duras (1968).
• Dimanche 6 juin à 16 heures : Nicolas Maury et Laure Calamy présentent « Garçon Chiffon ».