Photo-chorégraphies à la Collégiale

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Trois femmes photographes sensibles et poétiques réunies autour du mouvement, de la chorégraphie, sous le commissariat de Christian Gattinoni. La belle proposition estivale de la Collégiale St-Pierre-le-Puellier. A découvrir d’urgence.

Culture

Photo-chorégraphies à la Collégiale

En cet après-midi ensoleillé, la Collégiale St-Pierre-le-Puellier se dévoile sous un nouveau jour. Métamorphosée en temple de la photographie, l’église millénaire est investie par une nouvelle exposition, "Photo-Chorégraphies", jusqu'au 3 septembre 2023. Un périple onirique et sensible, dont le commissariat est assuré par Christian Gattinoni, présentant l’œuvre de trois artistes : Anne-Flore Labrunie, Corinne Mercadier & Gabriela Morawetz. Leur propos : mêler photographie et danse dans un tourbillon sensuel et magnétique, à couper le souffle.

« Comment imager la danse et faire danser l’image ? C’est un peu le sous-texte de l’exposition, introduit Christian Gattinoni. Il existe des chorégraphes plasticiens qui sur scène travaillent l’image. Là, il s’agit du pendant, d’artistes visuelles et plasticiennes qui chorégraphient des images et créent du mouvement. Anne-Flore donne naissance à des calli-chorégraphies, Gabriela à des photosculptures et Corinne travaille l’image tel un opéra visuel, avec un rapport entre le ciel et la terre. Leur point commun est d’être des femmes et de revendiquer un corps libre ! Je trouve cela important de montrer un corps revendiqué par les femmes qui investit tout son espace. » Un incipit prometteur en effet, donnant envie de se plonger à corps perdu dans l’exposition.

« Danser, danser, sinon nous sommes perdus »

Dans l’écrin de la collégiale, les trois artistes aux différentes pratiques, différents rapports à l’autre et au corps sont en totale osmose, illustrant à travers leur travail combien la photographie reste le plus dynamique des arts visuels, et la danse le plus dynamique des arts vivants. Le visiteur a toute latitude, toute liberté pour flâner au milieu de cette rêverie, entre polaroïds agrandis, panneaux de voiles, sculptures mobiles, petites séries qui obligent à entrer en intimité avec l’image ou grands tirages couleur hypnotisants. Un art photographique vivant !

Corinne Mercadier nous entraîne à la découverte de ses séries « Solo » et « Le ciel commence ici » : « On y voit tout mon travail de mise en scène, les objets que je peins, les costumes que je fabrique, comme un petit théâtre personnel. » La beauté, l’étrangeté, la fantaisie s’entremêlent entre ces ballons lancés au gré du vent, ces personnages seuls dans des espaces inquiétants ou encore ces toits remarquables comme celui du Château de St-Germain en Laye ou de l’Observatoire de Paris. « Tout est vrai. Il n’y a pas de montage, uniquement un travail de lumière et une direction d’acteurs qui sont tous des danseurs. Ils ont une façon d’être immobiles qui me touche beaucoup. »

Du côté d’Anne-Flore Labrunie, par ailleurs danseuse, et de sa série « Mue », il y a comme une pulsion, un appel : « Je mentalise mes lieux sans les connaître à l’avance. Puis j’utilise mon corps comme un pinceau, un descripteur. Avec ce corps de femme, quelque chose naît, grandit, s’efface, se meut, jusqu’au visible et à l’invisible. » Ses autres travaux expriment la même spontanéité, ses rituels, son geste presque naïf et ce besoin quasi viscéral d’être à la fois « derrière et devant l’image », de danser elle-même.

Avec Gabriela Morawetz, telle Alice on passe de l’autre côté du miroir, avec une œuvre produite uniquement en studio. Ici, c’est le décor, la mise en scène, qui est le sujet. S’entremêlent ses photosculptures et ses panneaux de voile teintés d’étrangeté - là encore - et d’onirisme, qui deviennent des chambres d’apesanteur. S’élèvent aussi ses sculptures mobiles dialoguant avec un ensemble de miroirs et de photographies tel un livre à feuilleter et une autre sculpture peuplée de corps évanescents, suggérés, en transparence, invitant le spectateur à se promener tout autour d’elle. Jusqu’à se perdre….

En savoir plus

Christian Gattinoni est membre de l’Association Internationale des Critiques d’Art, rédacteur en chef de la revue en ligne www.lacritique.org. Les Nouvelles Editions Scala viennent de publier son essai « Quand l’image performe / Comment imager la danse et faire danser l’image » suite de sa recherche sur les liens danse, performance, image.

Collégiale St-Pierre-le-Puellier

Jusqu’au 3 septembre

Entrée libre : du mardi au dimanche de 14h à 18h, fermeture les jours fériés.

Visites guidées du commissaire d’exposition les dimanches 23 juillet et 20 août à 16h30 (résa conseillée, du mardi au samedi après-midi, au 02 38 79 24 85)

Article : E.Cuchet